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Faut-il se méfier des applications de santé ?

applications de santé

La santé mobile : une diversité d’objets connectés et d’applications pour prendre soin de soi

Aujourd’hui, il est courant de trouver sur nos smartphones des applications pour suivre notre condition physique, notre santé mentale, nos cycles menstruels ou encore pour mesurer notre tension artérielle. Selon la Haute Autorité de santé, leur nombre a été multiplié par sept en seulement quatre ans, passant de 100 000 à plus de 350 000. Ces applications promettent de nous aider à prendre soin de notre santé et de notre bien-être, mais sont-elles réellement fiables, efficaces et sécurisées ? Trois experts nous éclairent sur le sujet.

Un double avantage, mais une qualité variable

Selon Linda Cambon, coresponsable du consortium scientifique Evidans au CHU Bordeaux, les applications qui encouragent le changement de comportements, comme l’arrêt du tabac ou la pratique sportive, offrent un double avantage : l’accès à des contenus éducatifs et à des groupes de soutien, ainsi qu’une certaine efficacité à court terme. Cependant, au fil du temps, la motivation peut s’estomper et l’utilisateur se trouve confronté à la difficulté de maintenir ces changements à long terme. De plus, la qualité de ces applications varie énormément, certaines étant basées sur des techniques éprouvées tandis que d’autres n’ont aucun fondement scientifique ou éthique. Malheureusement, il n’existe aucune régulation ou stratégie d’information pour les distinguer. Par ailleurs, certaines applications peuvent causer de l’anxiété ou de la dépendance, orienter les comportements de manière défavorable ou même se substituer à une prise en charge médicale professionnelle.

Enfin, pour Linda Cambon, il est essentiel de ne pas se tromper de cible. En effet, derrière la rhétorique de l’innovation, il ne faut pas oublier que la responsabilité des comportements liés à la santé repose avant tout sur les conditions de vie des individus. Ainsi, les applications en prévention ne doivent pas occulter les véritables enjeux de santé, à savoir les déterminants sociaux tels que les conditions de naissance, de vie, de travail et de vieillissement, ainsi que leur impact sur les inégalités sociales de santé.

Les applications pour la santé des femmes : des enjeux éthiques et une nécessité d’éducation au numérique

Catherine Vidal, neurobiologiste et membre du comité d’éthique de l’Inserm, s’intéresse plus particulièrement aux applications dédiées à la santé des femmes, également appelées « Fem-Tech ». Selon elle, ces applications pour le suivi des cycles menstruels ou de la fertilité offrent de nombreux avantages tels que la commodité, la gratuité et l’autonomisation des femmes dans la gestion de leur santé reproductive, notamment dans les pays où les gynécologues sont peu nombreux. Cependant, une étude internationale a remis en question leur fiabilité, notamment en ce qui concerne la prédiction de la date d’ovulation. De plus, la majorité de ces applications partagent les données intimes des utilisatrices avec des tiers à des fins commerciales, sans leur consentement. Bien que le Règlement général sur la protection des données (RGPD) en Europe soit censé protéger les données personnelles, la plupart de ces applications ne sont pas considérées comme des dispositifs médicaux et échappent donc à cette réglementation. Il est donc urgent de mettre en place des programmes d’éducation au numérique pour permettre aux femmes (et aux hommes) d’évaluer les bénéfices et les risques de ces applications.

Des applications validées et prescrites par des professionnels de santé pour un suivi efficace

Boris Hansel, nutritionniste et endocrinologue, ainsi que coresponsable du Centre de responsabilité santé connectée à l’hôpital Bichat Claude-Bernard à Paris, souligne l’importance de confier sa santé à des applications validées et prescrites par des professionnels de santé. Par exemple, les applications pour le suivi du diabète ou de l’insuffisance cardiaque font partie intégrante du parcours de soin du patient et ont été évaluées médicalement. De même, les applications de thérapies comportementales et cognitives pour traiter l’insomnie sont actuellement en cours d’évaluation médicale pour être remboursées. En revanche, il est déconseillé de se fier à des applications qui avancent des allégations douteuses et des conseils qui peuvent interférer avec la prise en charge médicale. Pour Boris Hansel, l’efficacité d’une application en santé doit être prouvée par des essais cliniques, comme c’est le cas pour l’application Obécoach qui est en cours d’évaluation en France.

Sources

Cet article a été adapté à partir de contenus publiés par l’Inserm. Retrouvez l’article source et l’ensemble des références sur le site de l’Inserm.

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